Chouette vision de l'avenir que tu nous fais partager Jean-Marc. Vraiment
chouette. Mais c'est tellement bien écrit, c'est tellement puissant
et surtout, c'est tellement plausible que ça donne des frissons
dans le dos.
Début du XXIè siècle, l'Algérie est plus que jamais plongée dans la guerre civile où s'affrontent pêle-mêle les Islamistes, les milices armées du pouvoir dictatorial et les rebelles kabyles. C'est dans ce contexte que le petit village d'Aït-Idja est attaqué par un commando sous les ordres du mercenaire français Max Tannart. Tous les habitants sont massacrés et qui plus est, Fatima Saadi, une jeune et jolie Kabyle est violée par Tannart lui-même.
Lorsque Djamal, le frère de Fatima, apprend la terrible nouvelle, il n'a plus qu'une idée en tête : retrouver le salaud qui a anéanti son village et déshonnoré sa soeur. Mais même pour cet ex-rebelle, gloire de la résistance kabyle, une quête dangereuse l'attend. Car sa vengeance, il ne peut l'accomplir qu'en se rendant en France où le mercenaire est reparti. Et la France est devenue un pays faciste, dirigée d'une main de fer par le Parti National. Les étrangers ne sont pas les bienvenus. Qu'à cela ne tienne, Djamal est décidé à accomplir sa vengeance, son Jihad.
Ligny délaisse un temps la science-fiction pure et le fantastique pour s'attaquer au thriller de politique-fiction. Et le résultat est plus que satisfaisant car Jihad s'avère un excellent roman. Côté intrigue, il n'y a rien à redire, Ligny étant un formidable conteur, ménageant le suspense et distillant les rebondissements de main de maître jusqu'aux dernières pages.
Plus qu'une histoire de vengeance, de quête personnelle, c'est le contexte et l'ambiance qui font de ce roman une oeuvre forte qui vous marque. La projection dans un futur pas si éloigné de nous est si précise que tout nous semble vrai et surtout possible. C'est une France apocalyptique que nous dévoile Ligny, un pays livré à la haine raciale et à un ordre nouveau faciste. Dans ce simulacre de démocratie, les milices CAID, véritables réminiscence des SS, maintiennent une atmosphère de délations, traquant sans relâche tous les éléments susceptibles de "troubler l'ordre public". C'est une France livrée au chaos où les mouvements de résistance et de lutte contre le pouvoir utilisent sans vergogne la violence, perpétrant des attentats sanglants. C'est une France muselée où la liberté de parole et de penser est soigneusement baïllonnée. Sans être une seule fois écrit noir sur blanc, le fantôme de Vichy plane sur ce tableau nauséabond.
Ligny en profite pour régler quelques comptes et nous ouvrir les yeux sur une pausible dérive politique de notre pays. Mais il ne tombe pas pour autant dans un manichéisme basique. Chez lui, personne n'est jamais tout blanc, jamais tout noir, à part Max Tannart bien-sûr.